mercredi 2 avril 2014

[Chronique] Fortune cookies ~ Silène Edgar




Titre : Fortune cookies
Auteure : Silène Edgar
Editeur : Bragelonne - Collection Snark
Nbre de pages : 126

Quatrième de couverture

Bretagne, demain :
Une coupure d'électricité plonge la petite vie de Blanche et Hadrien dans le noir, ainsi que toute l'Europe. Un mystérieux appel résonne sur les ondes : le gouvernement cache qu'il se passe quelque chose au Sud... la guerre ? Leur fille est loin, en vacances au-delà des Pyrénées. Hadrien décide de partir immédiatement à sa recherche, mais Blanche a peur.

Paris, après-demain :
État d'urgence, peuple bâillonné. Blanche est devenue Bianca, résistante. Les opposants à la dictature médiatique utilisent les réseaux de consommation pour faire passer leurs messages, sur les barquettes de poulet, les barils de lessive ou dans les fortune cookies, mais, bientôt, il faudra aller plus loin. Bianca trouve de la force entre les bras de Joshua, et jamais elle ne parle ni d'Hadrien, ni d'Elisabeth.

Quelque chose a basculé sur la route.

Ce que vous y trouverez :

- de la sensibilité (mais pas de la sensiblerie, j'insiste !) 
- de l'émotion et de la justesse dans un récit pourtant dur
- un monde dépeint avec réalisme et exactitude

Ce que vous n'y trouverez pas :

- des batailles sanglantes et épiques
- de l'action
- des réponses à toutes nos questions

Mon avis :

Par où commencer ?
J'ai déjà eu l'occasion de lire Silène dans un autre genre avec Moana ou les Moelleuses mais cet ouvrage n'a rien à voir.

L'histoire est celle que vous et moi pourrions vivre dès demain. Et au-delà du fait que le réalisme avec lequel Silène traite les évéments est particulièrement réussi et prenant, le récit fait froid dans le dos. Il émane du texte une puissante réalité, un parallélisme effroyable et terrifiant.

C'est une histoire qui prend aux tripes, qui réveille les consciences et nous fait comprendre à quel point nous sommes parfois endormi dans notre quotidien morose et si répétitif. Englué dans notre routine métro-boulot-dodo, nous ne pouvons que constater notre inertie. C'est un peu cet effet - beaucoup à vrai dire - auquel j'ai été confrontée. Et quelle claque ! Le personnage de Blanche est empreint de réalisme, de sensibilité, , d'émotion face à ses faiblesses, sa passivité durant tant d'années de résonance dans notre réel.

Dans notre société actuelle et avec toutes les crises que nous avons connu, ce récit se teinte encore plus de vrai, de vécu et d'à-vivre. Parce que cela pourrait très bien nous arriver. D'ailleurs, l'un des personnages du roman nous le dit. Il écrit des histoires de ce genre et voilà qu'elles se produisent désormais... cela fait réfléchir.

Autre aspect à noter, les multiples clins d’œil à des œuvres telle que chansons très imagées et si appropriées, des romans, des textes officiels ou encore des poèmes. Ça donne un cachet supplémentaire au récit. Et bien évidemment, les noms de certains protagonistes qui m'ont bien entendu fait sourire (ils se reconnaîtront sans nul doute !).

La force de se récit est qu'il n'est pas moralisateur ou donneur de leçon. Il évoque un pan possible de notre évolution avec justesse et dureté, sans faux semblant, sans enrobage. Et c'est d'autant plus horrifiant. Terrible. Il dépeint notre société telle qu'elle est. La peur vous prend au ventre, vos tripes se remuent, votre gorge se noue, vos larmes montent. 

Il m'a fallu faire preuve de sang-froid pour ne pas pleurer durant le cours de danse de ma fille tandis que je lisais ce récit. J'ai vécu l'histoire de Blanche, Hadrien, Élisabeth et les résistants. J'ai été Blanche. J'ai ressenti ce qu'elle a ressenti et j'ai éprouvé aussi cette inertie. Cette lueur d'espoir dans le chaos et la peur quand tout se met en marche parce qu'il est trop tard pour reculer. Et le sacrifice... je n'en dirai pas plus. C'est dur. Vrai. Beau. Et c'est à lire.

Parce qu'en chacun de nous sommeille une Blanche et une Bianca. Il faut juste leur laisser la porte ouverte.

Je ne peux pas clôturer cette chronique sans faire référence à quelques citations de ce magnifique roman.

"Je sais déjà pourquoi je me bats. Mais ce film me convaincrait si ce n'était pas encore le cas."
"Perdue. Perdue dans cette Histoire avec un H qui a ravagé ma petite histoire à moi."
"Pour moi, c'est déjà fini, je ne jette dans la bataille que l'énergie du désespoir."
"J'ai trop attendu pour qu'on appelle cela de la force, c'est du désespoir. J'espère qu'elle n'attendra pas qu'il soit trop tard, elle. En fait, je veux faire en sorte que pour elle, il ne soit jamais trop tard."
"[...] il ne sait pas que je suis si loin, sur ce bord de route, dans le tunnel, terrorisée, enfermée à double tour dans mes angoisses."
Je n'ai plus qu'une seule chose à écrire...

Merci Silène.


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